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INTERVIEW
Liliane Camier
Artiste-peintre, elle présente son travail depuis 1974, actuellement elle a réalisé plus de 20 expositions personnelles et a participé à plus de 60 expositions collectives. Elle vit et travaille à Gentilly (Val-de-Marne).

INTERVIEW


Liliane Camier
Artiste-peintre, elle présente son travail depuis 1974, actuellement elle a réalisé plus de 20 expositions personnelles et a participé à plus de 60 expositions collectives. Elle vit et travaille à Gentilly (Val-de-Marne).

INTERVIEW





Liliane Camier
Artiste-peintre, elle présente son travail depuis 1974, actuellement elle a réalisé plus de 20 expositions personnelles et a participé à plus de 60 expositions collectives. Elle vit et travaille à Gentilly (Val-de-Marne).

Comment est-ce que vous avez décidé de devenir une artiste ? Quel est votre parcours artistique ?

J'ai toujours dessiné, j'étais sollicitée pour dessiner une affiche, ou un dessin pour illustrer un document. J'ai fait les Beaux-Arts à Dijon, ce qui fut immédiatement déclencheur de passion. Cependant la décision d'être une artiste peintre je ne l'ai pas prise dans cet élan, choisissant une voix plus commerciale, les arts graphiques à l'Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris, mon origine sociale modeste ou très fermée rendant difficilement envisageable la possibilité de gagner ma vie en peignant. Le choix des arts graphiques, le travail en agence s'est révélé très vite totalement insatisfaisant.

Tout en ne sachant plus très bien comment faire, l'expérience de la maternité avait bousculé ma vision et mon rapport à l'art, les sensations artistiques s'étaient complexifiées, l'histoire de l'art s'était écrite sans faire écho à la vie des femmes ou si peu. Il manquait une identification quelque part. C'est à ce moment-là que j'ai décidé d'être un peintre, avec un drôle de sentiment, celui d'être presque une autodidacte, ce qui était faux, l'idée d'une filiation est venue ensuite avec le travail personnel. La rencontre avec des groupes de femmes plasticiennes dans des années 1980 a été déterminante pour me conforter dans ma décision.

Mon parcours artistique s'articule autour de la couleur, c'est le moteur de mon travail. Tout d'abord non figuratif, l'expression de la couleur pour elle-même, mon expression s'est ensuite tournée vers une écriture plus descriptive qui a favorisé énergie et diversité à ma palette. Le dessin renouvelle les formes qui me suggèrent de nouveaux rapports de tons, les petites sculptures en papier mâché, les livres sont des poses nécessaires, stratégiques pour initier des possibilités inconnues jusqu'alors pour moi.

Je n'ignore pas la douleur du mal être, ni la souffrance de certains peuples, ni la colère contre l'injustice. Je peins pour rechercher le retour de l'énergie, les forces vives et positives puisées en soi-même.
Il s'agit d'une prise de conscience de la nécessité d'un peu de bonté envers soi-même pour chasser la tristesse.

Quelles sont des qualités primordiales pour un artiste à votre avis ?

Jouer, travailler avec le hasard, savoir le voir, le saisir, le sublimer. Entre la prédétermination du projet, se glisse l'imprévu, comme un acte issu de l'inconscient, en être surprise avec satisfaction.

C'est une ouverture vers d'autres possibles, l'imagination et l'invention en éveil pour montrer ce qui pourrait ne pas être vu. Mais elles peuvent être si différentes et contradictoires qu'après tout je ne saurais plus dire. Être soi-même mais c'est aussi vrai pour tout un chacun.

Quels artistes ont influencé votre œuvre ?

Il s'agit moins d'une influence que d'une filiation, les peintres que j'ai beaucoup aimés, et que j'admire encore, sont tous de grands coloristes : Matisse, Poliakoff pour ne citer qu'eux. Joan Mitchell pour ses vastes compositions au souffle tendu, la trace fulgurante de l'acte de peindre visible, intacte.

Ce n'est pas la ressemblance de la représentation qui me touche mais l'invention d'un espace sur le plan du tableau, la façon dont la couleur est posée en aplat ou matiériste. Certains tableaux de Maurice Denis m'enthousiasment encore, sans oublier ceux de David Hockney.

Liliane Camier, "Composition aux feuilles entêtées"
Pourquoi le thème de la nature vous attire-t-il particulièrement ?

Au plus loin de mes souvenirs d'enfance la nature a été pour moi un lieu d'enchantement, d'inquiétude aussi, mais au-delà de la douleur qui toujours vient nous trouver sur les chemins de l'être au monde. C'est un lieu originel qui me raccommode avec moi-même, la vie et le dessin, la couleur. L'éveil de toutes les sensations, olfactives, auditives et visuelles, semble bien être à la hauteur de mon désir de peindre, au diapason de mes recherches colorées.

Pour le moment je ne vois pas ce qui pourrait remplacer ce besoin de nature.
C'est aussi un signal pour veiller sur un bien collectif, la Nature, la terre, l'eau, la transparence de l'air, un bien que je crois fortement menacé.
Mes sensations me guident, enchantement ou inquiétude, je fixe un rapport de couleur, des zones d'ombres, leurs formes, je dessine sur le motif dans de multiples carnets de croquis utilisant une grande diversité d'outils, je travaille ensuite à l'atelier avec tout ce matériel. La genèse du tableau fait le reste : le travail de transformation à l'atelier, l'interprétation, avec la mémoire des choses avec l'oubli aussi.
Produire une série de nid ne montrerait-il pas une certaine attention aux petites choses qui habitent un environnement naturel ?

L'intérêt pour les petites choses remonte à cette période des années 1980 où la vie quotidienne voulait prendre sa place dans mon travail plastique. Le travail patient des oiseaux a quelque chose d'émouvant, c'est avec beaucoup de considération que je dessine ces habitations fabriquées par des êtres non humains.

C'est aussi dénoncer la position égocentrique de l'Homme par rapport à l'ensemble du vivant. Voir les nids, petites choses humbles, le temps se fait plus lent et je quitte un moment les rythmes urbains trop rapides, trop automatiques.
Liliane Camier, "Nids 04"
Racontez-nous un peu vos projets à venir.

Je souhaite continuer le thème de la Nature, proche et lointaine, aussi développer le thème de l'eau, la présence de l'eau dans le paysage. J'aimerais aussi aborder le rapport avec l'objet imprimé, le livre, le texte.